En 1863, lorsqu'une mandibule humaine est découverte dans la carrière de Moulin Quignon (Abbeville, Somme), elle parachève la démonstration de Jacques Boucher de Perthes (1788-1868) prouvant l'existence d'un Homme anté-diluvien, artisan des bifaces récoltés à plusieurs mètres de profondeur, juste au-dessus du banc de craie. Cette découverte est cependant rapidement mise en doute et finira par disqualifier jusqu'au site lui-même et les industries qu'il avait livrées.
Le ré-examen récent de ces fossiles mis au jour en 1863 (une mandibule) et en 1864 (28 ossements et dents) conservés aujourd'hui au Muséum national d'Histoire naturelle (Musée de l'Homme) a permis de confirmer leur attribution à Homo sapiens. A la lueur des connaissances actuelles, cette attribution est incompatible avec la provenance stratigraphique de ces restes anthropologiques dont l'âge est estimé à 600 000 ans. En effet, des datations directes de ces ossements par le radiocarbone les font remonter à une période historique, entre le 13e s et le 18e s., ce qui confirme leur nature intrusive dans le gisement.
Nous nous demanderons quel est l'Homme qui aurait pu être découvert à Moulin Quignon. Ce sera l'occasion d'un bilan sur l'évolution humaine en Europe occidentale au Pléistocène moyen et d'un positionnement dans les discussions en cours quant à leur attribution taxinomique (Homo heidelbergensis, Homo neanderthalensis...).