Le moment de l'émergence de la préhistoire en tant que discipline scientifique – au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle – coïncide avec la création, d'abord en Angleterre, puis dans le reste de l'Europe, des associations bourgeoises d'étude et exploration des montagnes, tels que les Club Alpins. Ces Clubs se donnent pour mission la connaissance et l'éducation à la nature et la protection de la montagne. Cela dans le but de développer des sentiments patriotiques et d'attachement au territoire national. Combinant des préoccupations scientifiques et patriotiques, ces associations permettent de relier et élargir à un public bourgeois les initiatives d'inventaire et de protection propulsées par les sociétés savantes nationales ou locales. Le cas d'étude de l'inventaire et de la protection des blocs erratiques suisses fournit un modèle pour notre analyse consacrée au site de la Vallée des Merveilles (Alpes-Maritimes).
Mon papier propose d'investiguer ce cas spécifique à travers une analyse croisée de la littérature scientifique, associative et touristique relative à la Riviera et à son arrière-pays franco-italien. Les signes gravés sur les rochers autour du Mont Bégo furent objet des intérêts convergents des adhérents aux Clubs Alpins italien et français et des sociétés savantes locales. Entre la fin du XIXe siècle et les années 1920, si l'intérêt des alpinistes permit des découvertes scientifiques, l'étude de ces dernières permit une connaissance de ces territoires mise à contribution par la naissante industrie touristique. Ces croisements seront au centre de ma présentation, éclairant le rôle des premières recherches préhistoriques dans l'histoire de la valorisation de ce territoire.